Cultures Food #1 Boucherie Bello
Le créateur de la Boucherie Bello s’est confié à cultures food durant un reportage complet sur sa passion et ses différentes entreprises.
- Boucherie Bello / 54 Rue de la Charité, 69002 Lyon
- Restaurant BLO / 37 Rue de la Charité, 69002 Lyon
- Crauser & Bello Traiteur / 42 Rue Franklin, 69002 Lyon
- Boucherie Bello Megève / 914 Route nationale, 74120 Megève
« La boucherie est un art dur mais qui vous apporte beaucoup humainement » Frédéric Bello.
La Vidéo Cultures Food
Pour la vidéo sur la boucherie de luxe lyonnaise, nous avons décidé de mettre en avant les inspirations japonaises de Frédéric Bello. Nous avons alors préparé un pain au lait japonais (Shokupan) et travaillé du boeuf Wagyu pour la réalisation du sandwich traditionnel japonais, le Katsu Sando.
Le Reportage Photo by Cultures Food
En collaboration avec le photographe lyonnais Jerome Poulalier l’équipe de Cultures Food a passé une journée complète avec le boucher. Les premières livraisons matinales, le travail de la viande, la boucherie et son quotidien sont mis en lumière a travers ces images colorées et immersives.
PodCast By Cultures Food x Gone And Food
« Fred, est-ce que tu peux nous présenter ton parcours, ta formation, ta cultures food, qui tu es, d’où tu viens, qu’est ce qui t’a amené à la boucherie Bello? »
Je suis originaire de St Claude dans le Jura, J’ai pas fait « boucherie » tout de suite, j’ai d’abord fait des études classiques et à 25 ans j’ai eu envie de changer d’air. Étant un grand passionné de cuisine et plus particulièrement de viande et de boucherie, c’était un choix assez logique. Donc j’ai fait un stage découverte, ça a été assez rapide, on m’a dit « Ok t’attaques à 5h du matin mon grand, donc allez c’est parti ! ». Le lendemain c’était 5h pile ! Les carcasses arrivaient, on m’a donné un couteau pour faire deux trois bricoles pas trop compliquées. Et curieusement cela m’a tout de suite plu, ça a été un vrai déclic.
« Du coup tu as fait ta formation chez qui ? »
J’ai fait un CAP boucherie chez Sayard (Champagnole, 39), aux « Délices du Palais ». Je suis resté là-bas un moment et après je suis parti un an et demi dans un supermarché de campagne à Louhans en Saône et Loire.
On recevait des bêtes entières, on travaillait vraiment à l’ancienne. J’y ai fait pas mal de vente vu que j’avais les bases avec ma première formation commerciale. Puis le jour où je me suis senti prêt et assez armé techniquement pour ouvrir mon propre commerce, je me suis dis c’est parti, et j’ai ouvert ma boucherie à Lyon il y a 10 ans maintenant.
« Comment trouves-tu tes produits ? Tes producteurs ? Tes bêtes ? »
J’ai eu deux trois partenaires dont une coopérative dans l’Allier qui fait du bio, car je fais essentiellement de la viande bio. Ma grosse passion c’est le côté concret, j’ai passé quasiment tous mes lundis pendant des années à aller voir les éleveurs et à aller dans des foires pour rencontrer des gens passionnés comme moi. Et là je me suis fait, petit à petit, un réseau de personnes qui travaillaient bien en amont de la boucherie : l’élevage et l’agriculture.
Déjà c’était par plaisir personnel, pour savoir comment on élève les bêtes, pour ensuite pouvoir bien les choisir et créer de vraies relations humaines. Aujourd’hui je travaille avec 7-8 éleveurs différents en Aubrac, en Salers, en Bazas et un peu en Limousines. Des éleveurs que je revois deux trois fois dans l’année, soit sur les foires soit directement chez eux. On travaille main dans la main, quand il y a une bête qui manque un peu de finition, d’un peu de gras, on voit pour trouver des solutions pour qu’elle soit plus grasse, on prend peut être un peu plus le temps. Je leur envoie toujours des photos des bêtes, ils aiment bien et ils sont contents de savoir comment les bêtes sont travaillées et ce qu’elles sont devenues.
« Est-ce que la découpe du boeuf, de l’agneau et du cochon font appel à des compétences différentes ? Laquelle est la plus difficile ? »
Alors le plus difficile et le nerf de la guerre c’est le boeuf, pour nous c’est la moitié du chiffre d’affaires, les gens viennent majoritairement pour ça. Niveau affinage, découpe etc, il faut faire les choses correctement. Après si tu fais que du boeuf toute ta vie et que tu dois faire un agneau, tu ne sauras pas faire. C’est des techniques très différentes.
« Tu nous disais précédemment que tu travaillais essentiellement des viandes bio ? Ça veut dire quoi réellement une viande bio ? »
Alors pour le boeuf bio, il y a un cahier des charges, et en gros il y a trois principaux critères :
• Le bien être animal : Il y a une superficie par bête imposée et bien distincte.
• L’alimentation : Les éleveurs produisent en majorité leurs propres céréales qui sont elles-même bio, pour économiser et maîtriser le travail de bout en bout.
• Les médicaments : Les bêtes n’ont pas le droit de recevoir d’antibiotiques, sauf exceptions. Nous devons privilégier les médecines douces qui marchent très bien, même pour des bêtes pouvant peser jusqu’à une tonne (l’homéopathie, les plantes, l’ostéopathie). Si vraiment la bête n’arrive pas à être soignée, on a le droit de lui donner une dose d’antibiotique. Je crois que c’est une ou deux fois par an maximum. Si on dépasse la bête sort du champ d’application bio.
C’est d’autant plus vrai et renforcé pour le cochon et la volaille, d’ailleurs c’est pour ça que c’est là où il y a la plus grande différence de prix entre traditionnel et bio. Tout est fait naturellement donc une volaille que vous mettez 40 jours à engraisser contre 150 jours pour des bio, vous comprenez bien qu’il ya une différence de prix.
« Donc bio ça veut dire meilleur ? »
Pas forcément, une personne qui ne fait pas de sélection sur ses animaux ou s’ils ne sont pas forcément bien conformés, même s’il est bio et qu’il suit le cahier des charges vous n’aurez pas forcément un meilleur goût. S’il ne prend pas assez de temps pour les faire grandir, ne leur donne pas assez de céréales l’hiver, ou ne pas sélectionner de bons parents pour avoir de bons gènes, vous allez vous retrouver avec une viande moyenne. Après il y a le travail du boucher. On peut acheter une viande bio très bonne mais si on ne la fait pas affiner assez longtemps, si on ne la travaille pas convenablement, vous aurez un produit quelconque dans votre assiette. On peut avoir du non bio extra mais sur l’éthique, la méthode d’élevage, on a aucune garantie. Après c’est au boucher de choisir ses bêtes en fonction de sa vision et de son éthique.
Bio ne veut pas forcément dire bon, mais je pense qu’on est du bon côté. Il faut savoir que les éleveurs aiment leurs animaux, quand j’achète des bêtes et qu’elles doivent partir à l’abattoir, ils sont contents d’avoir bien vendu le fruit de leur travail. C’est des animaux qu’ils ont vu naître sur leur exploitation, c’est pas anodin. Il les amènent eux même à l’abattoir, il ne veulent pas qu’ils soient ramassés. Il existe un vrai lien entre l’éleveur et ses animaux.
« Donc tu t’impliques réellement dans le choix de tes bêtes ? »
Oui c’est le gros du travail, ça prend du temps et ça coûte de l’argent avec les déplacements mais c’est ma passion. C’est magnifique, les éleveurs me mettent de côté leurs meilleures bêtes, ils sont contents quand quelqu’un vient les voir, ça permet, en plus du côté social, de se régler sur la qualité de la viande. Demain je reçois quelques bêtes à moi, des Wagyu. Elles sont dans le Morvan chez un producteur, on les a achetées petites, il s’en est occupé, les a fait grandir, et là on reçoit la première.
C’est là où la relation humaine est cruciale. Ils devaient être prêts il y a 6-8 mois mais à cause de la sécheresse les céréales ont été pauvres, donc cela a nécessité plus de temps. Et ça si on a pas cette relation étroite, on n’échange pas et on se trompe.
« Peux-tu nous parler des concours où tu achètes tes bêtes ? »
Alors les concours c’est très sympa car j’y retrouve tous les maillons de la chaîne, donc humainement c’est incroyable. C’est un mix d’éleveurs, de grossistes, d’agriculteurs, de bouchers , de livreurs, et c’est très rural. Il existe des concours de toutes tailles, on connait tous par exemple le salon de l’agriculture à Paris, ou encore le marché de St-Christophe-en-Brionnais. Moi je vais plutôt dans des petits concours en Auvergne, c’est là où je retrouve les races que je préfère et où sont mes éleveurs. Après c’est des enchères, soit à main levée soit avec des petits boutons et y’a un commissaire priseur. J’en ai acheté cinq cette année, on a cassé la tirelire (rires) : deux Salers, deux Aubrac et une Aubrac croisée Piémontaise. Sur les cinq, quatre appartenaient à des éleveurs avec qui je travaille régulièrement, et on ne le sait jamais avant l’achat.
« Y a t-il des morceaux de boeuf que tu fais maturer toi-même ? »
Alors avant la maturation, il faut faire rassir la viande. Ma bête reste 15 jours à l’abattoir, en demi, puis je fais venir l’avant au bout de 15 jours car c’est des morceaux qui ne nécessitent pas forcément plus d’affinage. Après la cuisse et le faux-filet restent entre 3 semaines et 1 mois et après les trains de côtes je les laisse 45 jours. Il y a donc un roulement quand je reçois un avant je reçois aussi un arrière de la bête précédente.
« Les côtes de boeuf tu peux les laisser combien de temps ? Ça apporte quoi d’avoir une durée de maturation aussi longue que 100 jours ou plus ? »
Alors déjà ça peut être nécessaire, je pense à la Galice ou la Rubia-Galega. Sur des Rubia Galega, au bout de 45 jours elles vont être bonnes à manger et il y en a qui vont se révéler au bout de 3-4 mois. Pour voir si elles sont bonnes, on les touche, on les sent. Ce que l’on recherche avec la maturation, c’est d’abord le goût, la saveur, le parfum et c’est dans le gras que ça se passe. Mais avant tout il faut que ce soit une bonne bête, tu peux faire maturer une viande basique autant de temps que tu veux tu n’obtiendras rien du tout. Mais avec une viande de qualité, le gras va donner des saveurs à la viande au bout de 4 à 6 semaines. Après ça permet aussi d’attendrir la viande. La viande c’est plein de fibres, donc quand l’eau s’évapore, les fibres se craquellent et attendrissent naturellement la viande. C’est aussi pour ça qu’une cuisse de boeuf on ne va pas la désosser au bout de trois jours. Parce que premièrement dans ton assiette tu vas te retrouver avec un steak qui rétrécit de moitié, et puis surtout ça n’aura pas de goût et ce sera plus raide.
Sachant que l’eau s’évapore, le boucher perd un peu d’argent par rapport au poids, mais on le répercute sur le prix, c’est en partie pour ça que c’est plus cher en boucherie. Effectivement Il y a le prix d’achat de la bête qui est déjà plus cher, l’évaporation (la dessiccation) où on perd 5 à 10% du poids, puis il y a le parage. Tout ce qui a noirci va former une croûte autour de la viande et cela représente encore 5 à 10%.
« C’est quoi les tendances et l’avenir de ton métier ? »
Je pense qu’un virage à déjà été amorcé il y a deux ou trois ans, de plus en plus de jeunes reprennent des affaires dans les grandes villes. Il y a quelques bouchers parisiens qui ont été assez médiatisés, soit par la maturation soit par l’achat de bêtes de qualité. Les interviews et les plateaux télé ont beaucoup aidé à donner une nouvelle image à nos métiers. Cela a fait naître des vocations, je reçois pas mal de CV de jeunes qui veulent se lancer et tant mieux. À côté de ça, la mouvance vegan, végétarienne et surtout la partie scandale alimentaire, a permis à beaucoup de gens de prendre conscience de certaines choses : ne pas jeter un morceau de viande, l’aspect écologique et que, niveau santé, ce n’est pas conseillé de manger de la viande tous les jours. Je vois fréquemment des jeunes de moins de 20 ans faire l’effort de venir pour se faire un plat à l’ancienne type blanquette ou boeuf bourguignon. Ils demandent des conseils etc… Il y en a vachement plus qu’avant. Après tout le monde ne peut pas forcément se permettre ce genre de qualité mais en mangeant moins souvent de la viande ça devient plus accessible. C’est très positif et ça laisse présager de belles choses pour la filière de la viande : consommer moins mais mieux.
Tout le monde s’y retrouve. Les éleveurs et les clients sont contents, ils savent d’où viennent les bêtes, et moi je suis le plus heureux des hommes avec mon métier comme passion. Mes salariés sont contents aussi car ils travaillent de la bonne viande et ils prennent plaisir à la vendre. »
Cultures Food
« Cultures Food est un projet culturel multi-générationnel par l’optimisation de son contenu sur les différents canaux de communication. L’objectif : faire le lien entre le travail de l’artisan et le travail d’un chef. Valoriser les artisans et les produits de notre patrimoine tout ayant un angle professionnel et décalé. »
Cultures Food est né de notre envie de mettre en avant différemment les artisans et acteurs de l’agriculture moderne à travers un oeil neuf et créatif. Cultures food est une passerelle artistique permettant de mettre en avant des savoir-faire aux plus grand nombre, tenant compte et exploitant au mieux les nouveaux moyens de communication.